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4 décembre 2014 4 04 /12 /décembre /2014 06:23

Beaucoup d’entre vous ont sûrement déjà acheté et lu ModeMen de Julien Scavini. Je n’ai que trop attendu pour en dire quelques mots.

 

julien-scavini-modemen-copie-1.jpg

 

Pour rendre son propos plus vivant, Julien Scavini a imaginé un jeune homme, Antoine, qui, entrant dans la vie active, comprend qu’il est temps pour lui d’acquérir les rudiments de l’élégance masculine.

Le choix de ce personnage est révélateur du lectorat visé : Antoine est jeune et il est étudiant « en droit ou en finance, en management ou en histoire de l’art ». Le procédé (soufflé par l’éditeur ?) aurait pu être pesant si Julien Scavini n’avait eu la bonne idée de renvoyer souvent Antoine à ses chères études !

Le plan de l’ouvrage est lui aussi révélateur. Il n’a rien de révolutionnaire, et c’est très bien ainsi. Les têtes de chapitres reprennent les catégories traditionnelles, mais l’ordre dans lequel ces catégories sont traitées, qui suit les priorités d’Antoine, témoigne de notre temps. Ainsi, la chemise et le pull viennent en première et deuxième position, et il faut attendre la page 103 pour entendre parler du costume et la page 145 pour que vienne le tour du manteau. A titre de comparaison, De l’Elégance masculine de Tatiana Tolstoï en 1987 ouvrait sur ces deux thèmes.

Certains s’étonneront que la surchemise et le polo prennent place dans le chapitre sur le pull… dans lequel – tristesse du Chouan ! – le «  pull breton » dit « marin » (… ne me dites pas que c’est l’inverse !) n’est pas mentionné.

Quand il rapporte les pratiques vestimentaires de nos contemporains, Julien Scavini fait preuve de beaucoup de tolérance. Ce parti pris quasi maffesolien (j’observe, je constate sans juger ni regretter) donne des notations du genre : « Antoine peut choisir (…) sans autre préoccupation que son goût… C’est selon le goût de chacun… Inutile d’en faire une règle absolue… C’est une question de mode ». Détail significatif : vous ne trouverez pas dans ce guide l’équivalent des « Erreurs répugnantes » de Tatiana Tolstoï ou des « Nadirs de l’horreur » de James Darwen. Le jean, les sneakers et les runners sont évoqués ; le tee shirt a droit à deux pages.

A cette largeur d’esprit, plusieurs explications sont possibles. Julien Scavini est d’un naturel accommodant. N’oublions pas que c’est un commerçant habitué à composer avec les désirs de sa clientèle. On ne peut s’empêcher de penser qu’un autre commerçant – son éditeur – a eu son mot à dire.

Ces concessions à l’air du temps sont d’ailleurs à relativiser. Le point de vue adopté est d’abord celui d’un tenant du classicisme. « L’élégance classique, nous dit la première page, est un ensemble de règles de bon sens pour vous simplifier la vie au jour le jour. »

Les habitués de Stiff Collar  seront ravis de retrouver dans ce guide les points forts du blog. Pas de photos mais des illustrations signées de l’auteur. Je regrette toutefois que la qualité de l’impression ne les mette pas mieux en valeur. Les teintes sombres passent mal et pour tenter de distinguer les « unis »  des  « faux unis » (page 109), il m’a fallu me munir d’une loupe ! Un format plus grand eût été plus heureux. La présentation générale de l’ouvrage sent d’ailleurs très fort la maquette faite sur ordinateur ; ce petit côté « cheap » ne rend pas hommage au travail approfondi de Julien. Car ModeMen n’est pas un guide paresseux ! Les connaissances techniques du tailleur et les informations d’ordre historique du passionné foisonnent. Le blogueur (… illustrateur, tailleur, blogueur, Julien est tout cela à la fois !) n’a pas jugé utile de citer ses confrères ; qu’on permette à l’un d’entre eux de le regretter.

Précis, documenté, correctement rédigé, ModeMen est le meilleur guide sur l’élégance masculine de ces dernières années. Les néophytes comme Antoine y trouveront largement leur compte. Les Chouans exigeants aussi.

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commentaires

C
Votre article donne envie de lire le livre de ce styliste très "tolérant" comme vous dites, plus observateur que juge ou donneur de leçons de bon goût.
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F
Pendant ce temps, dans une autre galaxie, des lecteurs ecrivent a leur journal:<br /> <br /> November 12 2014<br /> <br /> Sir, I once knew a barrister who wore paper wing collars (“Downton drives crisp trade ”, Oct 31). Given the state of legal aid fees I imagine many more do today. I even once wore one with a dinner<br /> jacket, but noted that the late Philip Howard of The Times said that wing collars were not worn with DJs in England. Someone should tell the makers of Downton Abbey.<br /> Neville Peel<br /> Mottram-in-Longdendale, Cheshire<br /> <br /> <br /> November 12 2014<br /> <br /> Sir, Neville Peel (letter, Nov 12) quotes the late Philip Howard’s assertion that wing collars were not worn with dinner jackets in England. Wrong. They were de rigueur from the time of the<br /> invention of the DJ by members of the Tuxedo Club at Delmonico’s restaurant in New York in 1886 until the Second World War.<br /> <br /> Antony Stanley Clarke<br /> Mosterton, Dorset<br /> <br /> 20 November, 2014<br /> <br /> Sir,<br /> <br /> The DJ was not invented by New York’s Tuxedo Club in 1886 (letter, Nov.14). One of the club’s members, James Potter Brown, was introduced to it in England by its creator, the Prince of Wales, later<br /> Edward VII. The aim was to enable him to dispense with full evening dress while at sea during the first royal visit to India in 1875. There was no relaxation of other formalities. Sweating in<br /> temperatures of 100 F, the party rose to toast Queen Victoria at the end of each meal while the band played the National Anthem.<br /> <br /> Lord Lexden<br /> House of Lords<br /> <br /> 22 November 2014<br /> <br /> Sir,<br /> <br /> Unable to find an exact description of the coat the Prince of Wales wore on his passage to India in 1875. My letter (Nov 14) was based on family gossip which should not perhaps be ignored. My<br /> grandfather, Sir Stanley Clarke, served Edward VII for more than 30 years. In the American corner, my aunt Katherine St George was congresswoman for Tuxedo who shared a house there with Emily Post,<br /> the doyenne of American manners. What is beyond doubt is that “tuxedo” appeared in print in 1889 (OED), two years before “dinner jacket”. My loyalties are dreadfully torn.<br /> <br /> Antony Stanley Clarke<br /> Mosterton, Dorset
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J
J'oubliais enfin, oui les illustrations sont sombres. Je n'ai eu de cesse pourtant de les prévenir. Pour mes chroniques du Figaro, j'ai l'habitude d'éclaircir beaucoup. Je pensais qu'un éditeur<br /> aurait plus d'expérience sur le sujet... Un vrai regret que j'essaierai de combler si j'arrive à écrire un second opus !
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J
C'est l'occasion pour moi de faire un récit complet de cette aventure!<br /> <br /> Le livre m'a en effet été commandé. Deux ans de travail. Le format était imposé. En revanche, pas à un seul instant mon éditeur n'a émis des réserves ou des critiques. A vrai dire, les dames que<br /> j'avais en face de moi, charmantes et disponibles, n'y connaissent rien en mode classique homme, si bien qu'à aucun moment je n'ai été dirigé. Elles auraient pu vouloir un esprit bien plus<br /> moderne.<br /> <br /> En effet, j'ai voulu être didactique et jamais trop virulent. L'idée que cet ouvrage se vende (un peu) n'était pas loin dans mon esprit malgré tout. Pour autant, si j'ai fait des concessions,<br /> c'était dans l'optique de rendre le livre aussi ancré dans son temps que possible, pour en faire un cliché d'un instant donné. Un instantané de la mode aujourd'hui.<br /> <br /> Malgré cette idée, mon livre n'est pas tellement un livre pour jeune. La mode décrite est plutôt d'essence années 50. Même les tshirt de dessus sont dans la partie sous-vêtement, un signe ;)<br /> <br /> L'ordre des chapitres est venu un peu par hasard en fait. Mais votre remarque est amusante, elle est révélatrice en effet. Le titre aussi, trouvé à la dernière minute. J'aurais préféré un titre en<br /> français, comme Le Gentilhomme Elégant, mais l’éditeur voulait quelque chose de plus accrocheur. Comme je n'avais pas mieux, je me suis incliné, une unique fois !<br /> <br /> Je suis enfin extrêmement honoré de votre article. Un article bien construit, une critique bien faite, vous êtes le seul pour l'instant !
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