La mode des carreaux revient régulièrement. Preuve de leur pouvoir de séduction. Preuve, aussi, de leur faculté de lasser. Avec eux, c’est comme avec certains amis : il faut les avoir un peu oubliés pour mieux goûter leur compagnie !
Leur histoire est ancienne. Le tartan écossais fut d’abord un signe de reconnaissance clanique. Plus tard, dans les années 1820, Walter Scott lança dans le beau monde la mode des pantalons à carreaux inspirés de ceux que portaient alors les bergers. Plus tard encore, le futur Edouard VII établit la célébrité du prince de galles (glen urquhart). Il fit couper dans ce drap de magnifiques et opulentes tenues de voyage. Son petit-fils, le futur Edouard VIII, perpétua avec bonheur la tradition :

Les années 30 mirent les carreaux à l’honneur : « Carreaux, carreaux, carreaux ! » titra Adam en octobre 1933. Le prince de galles fit fureur. Il faut voir avec quelle élégance désinvolte Cary Grant le portait :
Les années 90, enfin, virent la vogue des vestes à carreaux-fenêtres :
Veste Pal Zileri, 1997, Monsieur n° 11
L’ordre que nous intiment les créateurs et stylistes de porter cet hiver des carreaux - dont Monsieur de septembre-octobre s’est fait l’obligeant relais - n’a donc rien de révolutionnaire : notre saute-mouton historique suffit à le prouver. « La tendance ? » demande Monsieur à quelques faiseurs de mode de renom. Franck Boclet (Ungaro) de répondre : « Les carreaux ! On les porte sur un pantalon, blouson, trois-quarts, mais plus sur les vestes. On est dans l’ère (sic) du dépareillé inversé, les vestes sont unies et les pantalons à motifs. » Et Marc Guyot de préciser : « Prédominance du carreau : pied-de-coq, carreau-fenêtre, clan écossais, vichy à gros carreaux, prince de galles, même s’il est en perte de vitesse. »
Va donc pour les carreaux… à condition de faire preuve d’un certain discernement ! Ne mettez pas un caméléon sur un torchon à carreaux : il deviendrait fou. Ayez la même prudence pour vous-même : pas de total look voyant. Voici deux exemples à ne pas suivre; l’un date d’hier et l’autre d’aujourd’hui :
Hugo Boss
Evitez les chemises à carreaux qui vous feraient ressembler à un Américain moyen en week-end. Proscrivez la veste de bûcheron, définitivement hideuse, et dont on comprend mal que Monsieur l’ait retenue comme un « authentique de l’automne » :
Pas de house check visibles, façon Burberry ou Hackett - le premier, à cause de ses connotations conventionnelles et bourgeoises : ce clan n’est pas le nôtre ! Le second (carreaux orange sur fond vert), parce qu’il fatigue vite. Quant au « dépareillé inversé » cher à Boclet, je doute qu’il coure nos rues cet hiver !
Oui, en revanche, aux vestes à carreaux-fenêtres qu’un duo cravate et chemise neutres saura mettre en valeur. Oui, encore, aux costumes prince de galles, droits ou croisés, coupés dans de voluptueux saxony : c’est ainsi qu’on les aime !