L'élégance au masculin : réflexion(s) - conseils - partis pris.
Voilà quelques saisons déjà que les jeunes ont redécouvert le chapeau. Cette redécouverte s’est faite timidement : leur choix s’est dirigé vers un chapeau tout petit (genre Trilby), qu’ils portent presque toujours sur le sommet de leur crâne, comme s’ils avaient peur de l’enfoncer. Encore quelques années, et peut-être le chapeau retrouvera une taille correcte et recouvrira comme il convient les fronts.
Un phénomène analogue touche la casquette plate, dont la visière est systématiquement trop courte, et que nos jeunes rejettent en arrière comme le faisait autrefois Bourvil – mais quand lui le faisait, c’était pour camper des benêts…
Dans Le Rosier de Madame Husson
Le petit chapeau ou la petite casquette sont généralement accompagnés d’une petite barbe – dite de trois jours -, d’un petit pantalon – trop court et trop étroit -, d’une petite veste – qui dévoile la moitié du derrière.
Ce goût du chiche doit vouloir dire quelque chose sur l’état de notre société. Pour ma part, je me cantonnerai au seul aspect esthétique et rappellerai ces sages préceptes darweniens : chapeau à petit bord et casquette à petite visière = petit goût !
On ne réapprend pas en quelques semaines ce qu’on a mis des décennies à désapprendre. Les chapeaux à larges bords et les casquettes à visière généreuse mettront du temps à revenir – s’ils reviennent ! Encore faudrait-il que le reste de la tenue suive…
Il ne m’étonnerait pas qu’un autre couvre-chef, très oublié celui-là, soit bientôt redécouvert. Je veux parler du béret. Je verrais bien que les jeunes gens issus de l’immigration s’approprient quelque jour ce symbole vestimentaire on ne peut plus « souchien ». Gageons qu’ils le feraient avec cette ironie dont les chroniqueurs de mode à la mode raffolent !
Il fut un temps où le béret coiffait des hommes élégants et raffinés. Il y eut le poète béarnais Paul-Jean Toulet, qui ne le quittait pas - même à Paris :
Il y eut André Gide, grand amateur d’originalités chapelières :
Il y eut André Malraux :
... et Pierre Drieu La Rochelle :
Il y eut même le prince de Galles, futur Edouard VIII :
Entre les deux guerres, le béret fut à la mode. « La casquette, c’est bon pour les ouvriers, le chapeau, c’est pas pratique, tandis que le béret (prononcez : bairait !), c’est simple, c’est chic, c’est coquet », faisait dire, en 1932, Jacques Prévert à Carette dans L’Affaire est dans le sac, un film réalisé par son frère Pierre.
La mode du béret témoigne de l’évolution au XXe siècle du vestiaire masculin vers la décontraction. Cette évolution n’alla pas sans errements. Doit-on placer l’adoption de cette coiffure venue du sport au nombre de ceux-ci ? A mon sens, si maladresse il y eut, elle tenait moins au béret en tant que tel qu’à sa forme (souvent trop étriquée) et qu’aux tenues avec lesquelles on le portait.
Le béret mériterait qu’on s’y intéresse à nouveau. Je me souviens qu’Arnys en proposa quelques-uns dans les années 2000 dans de jolies couleurs, mais j’ignore ce qu’ils donnaient sur une tête :
Qu’un chapelier de talent m’en confectionne un de forme ample, j’en serais ravi ! Je l’adopterais tout de suite. Je le porterais sans ironie. Et pas seulement pour aller acheter ma baguette de pain.