L'élégance au masculin : réflexion(s) - conseils - partis pris.
Pour ouvrir l’année, ce billet sans conséquence… histoire de me mettre en jambes.
Les mois de juin-juillet ont été riches en grandes manifestations sportives aptes à aiguiser notre fibre patriotique. Il y eut la coupe du monde de football et le Tour de France. J’ai suivi la première plus que le second. Le Tour de France m’intéressait lorsque j’étais enfant. J’écoutais chaque été sa retransmission sur mon petit transistor. Poulidor était mon champion – héros sympathique, modeste, insubmersible. Poulidor et son physique de bon fils, et son accent rassurant, et son nom à surnom(s). On imagine ce qu’un Desnos aurait fait d’un nom pareil :
Pou lit dort
Poulie d’or
Poule y dort…
« Vas-y Poupou ! » criaient les foules – qui ne pouvaient pas en dire autant avec Anquetil. Question d’oreille. Poulidor, pour un cycliste, un nom en or.
Antoine Blondin, maître du raccourci, emballa le tout dans un mot-valise : la « Poupoularité ».
Sur le chapitre des patronymes, l’avantage, aujourd’hui, va aux cyclistes. La plupart de nos footballeurs ont des noms bizarres. Je ne suis jamais bien sûr, par exemple, de prononcer correctement celui de notre gardien de but, « Lloris ». Côté cyclistes, en revanche, cette année nous a réservé une belle surprise avec le dénommé Tony Gallopin. Son prénom en forme de diminutif d’origine étrangère révèle la modestie du milieu ; il le rend d’emblée sympathique auprès du public du Tour de France. Son nom, surtout, est merveilleux. Un « Gallopin » ne peut pas être un méchant homme ! Gallopin perpétue la tradition des cyclistes à noms cocasses : Petit-Breton, Barbotin et, bien sûr, Poulidor.
Ce Tour 2014 nous gratifia aussi d'un Pinot. A notre palmarès des patronymes, nous le placerons juste au-dessous de Gallopin. Pinot, P-i-n-o-t – non « Pinault » comme le milliardaire, mais « Pinot » comme le simple flic !
A quand dans l’équipe de France de football un nouveau Platini (… et pas seulement pour une histoire de nom) ? Platini, pour un footballeur, un nom… en platine !
Les choses se gâtent quand on aborde le chapitre des apparences. Chez les uns comme chez les autres, les apparences sont douteuses… Pauvres cyclistes, qu’on oblige à revêtir des combinaisons aérodynamiques moulantes, multicolores et recouvertes jusque sur les fesses de noms de bienfaiteurs !... Un casque et des lunettes non moins aérodynamiques finissent de les faire ressembler à de drôles d’oiseaux tombés de nids extraterrestres ! La responsabilité des footballeurs est, elle, directement engagée. Personne ne les oblige à s’enlaidir comme ils le font. « Brésil 2014 » fut aussi le festival du tatouage monstrueux et, du point de vue capillaire, la coupe de l’immonde ! Sur le terrain du mauvais goût, aucune équipe, je crois, ne fit jeu égal avec la nôtre.
Notre maillot, pourtant, avait plutôt belle allure – d’un beau bleu nuit, cintré comme il faut, et agrémenté d’un mignon col Claudine immaculé, censé rappeler le maillot de l’équipe de 1958.
Si j’avais un conseil à donner à l’un de nos footballeurs soucieux de se singulariser, ce serait celui-ci : « Laissez votre peau tranquille ; coiffez-vous correctement ; glissez plutôt votre maillot dans votre short à la façon de vos aînés. Ce simple geste attirera l’attention sur vous et suscitera des imitateurs. »
Les excentricités cutanées et capillaires des footballeurs rappellent celles des héros de la télé-réalité. C’est dire. A côté, les audaces timides des cyclistes ont quelque chose de rafraîchissant : une petite boucle d’oreille par-ci, un minuscule tatouage par-là…
Chaque étape du Tour se termine par un rituel désuet à souhait : la remise des maillots. La bonne grâce avec laquelle les cyclistes s’y plient est touchante. Imagine-t-on l’aimable Benzema, revêtu d’un maillot à pois, sourire entre deux hôtesses très typées miss-du-coin, un petit bouquet à la main ?
Le sort, c’est connu, ne manque pas d’ironie. A quoi tenait, naguère, la popularité de Jean-Pierre Papin ? A son talent, bien sûr, mais aussi à son physique, à son sourire à la Bourvil, et, même, à son nom. Un nom, un sourire, un physique… de cycliste !
Entre la simplicité populaire des cyclistes et le narcissisme puéril des footballeurs, mon cœur ne balance pas.