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14 juin 2010 1 14 /06 /juin /2010 07:16

Certaines professions ont longtemps joui d’une réputation d’élégance : les banquiers, les commissaires-priseurs, les avocats, les architectes, les professeurs de médecine… Cette réputation souffrait, à coup sûr, de multiples exceptions. Elle était cependant assez fondée pour avoir traversé des générations : une abondante littérature en témoigne. Des caractéristiques vestimentaires ont même été attachées à certains de ces métiers : le nœud papillon pour les avocats, les professeurs de médecine et les architectes ; une certaine rayure de costume pour les banquiers.

Vous l’avez sans doute remarqué : je parle au passé. Car, dans ces professions aussi, les codes ont changé. Connaissez-vous beaucoup d’architectes adeptes du nœud papillon et beaucoup de banquiers habillés en banquier ? Quant aux avocats… J’aime beaucoup regarder Faites entrer l’accusé, l’émission que Christophe Hondelatte consacre aux grandes affaires criminelles. Mais si je la regardais dans l’espoir de trouver des idées de tenues élégantes chez les avocats interrogés, je serais bien déçu !

Les exceptions ont changé de camp : ce sont les médecins, les banquiers, les architectes bien habillés qui, maintenant, étonnent. Et, pour ainsi dire, détonnent. La dernière fois que j’ai vu un banquier vêtu d’un costume rayé bien coupé, c’était, au moment de l’affaire Kerviel, Daniel Bouton, alors directeur de la Société Générale. Cela ne suffisait d’ailleurs pas à le rendre élégant. Quels esculapes médiatiques actuels sont bien habillés ?... Et quels avocats ? Naguère on aurait cité Paul Lombard ou Robert Badinter. Mais c’était naguère… Le premier est né en 1927 et l’autre en 1928… Aujourd’hui ? On peut penser à Karim Achoui, qui, visiblement, prête attention à sa mise :

 

achoui-karim.jpg

 

Cela dit, son élégance est aussi douteuse que ses fréquentations : trop concertée et trop mode pour être convaincante. Des costumes de prix, assurément, mais pas sur mesure : la griffe plutôt que le style.

Précisons que Karim Achoui, condamné en décembre 2008 à sept ans de réclusion dans la fameuse affaire Ferrara, n’a plus le droit d’exercer sa profession.

A propos, il serait intéressant d’étudier les conséquences vestimentaires  qu’ont pu entraîner en France et ailleurs les accointances de certains avocats avec les voyous : voir les costumes de truand portés par les avocats marrons dans les films noirs des années trente et quarante. Chez les uns et chez les autres, le même goût de l’ostentatoire et de l’exagération. Mais chez les beaux mecs aussi l’élégance n’est plus ce qu’elle était : le blouson de cuir sombre a remplacé le manteau de cachemire beige clair ; plus de costume croisé aux trop larges rayures, mais un banal pull et un vulgaire jean… Ce serait plutôt du côté de certains rappeurs – parfois eux-mêmes gangsters - qu’il faudrait chercher les dignes héritiers des princes de la Haute d’autrefois.

De nombreux commissaires-priseurs, en revanche, perpétuent une respectable tradition d’élégance. Faillir à cette tradition relèverait en quelque sorte de la faute professionnelle. Les commissaires–priseurs fréquentent quotidiennement le passé et la beauté. Un tel voisinage favorise l’élégance, qui est avant tout une affaire de culture et de goût.

Voici, en guise de conclusion, quelques illustrations parlantes.

 

Architectes.

Hier :

le-corbusier.jpgLe Corbusier

 

Aujourd'hui :

jean-nouvel-portrait.jpgJean Nouvel

 

Avocats.

Hier :

badinter.jpg  Maître Badinter

 

Aujourd'hui :

dupont-moretti.jpgMaître Dupont- Moretti

 

Pour le plaisir des yeux, deux représentations de la figure de l’avocat dans des films des années cinquante :


jean-gabin-encas-de-malheur.jpgJean Gabin (et,accessoirement, Brigitte Bardot), dans "En cas de malheur"

                

louis-calhern-copie-1.jpgLouis Calhern (et, accessoirement, Marylin Monroe) dans "Quand la ville dort"

 

Commissaires-priseurs.


francois-de-ricqles-copie-1.jpgFrançois de Ricqlès, vice-président de Christie's 

 

michael-broadbent.jpgMichael Broadbent, Christie's

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commentaires

O
<br /> En ce qui concerne Nabe, si j'en juge par ces deux photos, sa mise s'apparente davantage au déguisement qu'au véritable style : à noter les boutons de col avec la cravate (quoi qu'on lise à droite<br /> et à gauche, cette association reste impardonnable) et le chapeau un peu trop juste, porté sur une masse capillaire inadéquate. Sur la seconde photo, les lunettes sont ridicules.<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> " A noter les boutons de col avec la cravate (quoi qu'on lise à droite et à gauche, cette association reste impardonnable)" : j'irai(s) moins loin que vous. Tout dépend :<br /> <br /> <br /> 1 - de la forme du col : il doit être assez long et dessiner une légère courbe. Le col de la chemise de Nabe est affreux.<br /> <br /> <br /> 2- du reste de la tenue. Avec un costume, cette association n'est certes pas recommandable (même si Agnelli...); avec une tenue dépareillée (veste sport ou blazer), elle est tout<br /> à fait acceptable.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> A noter la ressemblance(volontaire ?) que Nabe a avec le Corbusier, (lunettes, noeud papillon).<br /> <br /> <br />
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L
<br /> Je découvre ce site, avec beaucoup de plaisir, et vous en remercie !<br /> <br /> Concernant ce thème de l'élégance dans les différentes professions, peut-être que dans une seconde partie, aborderez-vous le cas des romanciers. Car j'ai pensé à Marc-Edouard Nabe, qui m'a paru<br /> élégant à travers quelques tenues : http://ctoileblog.files.wordpress.com/2010/02/marc-edouard-nabe-1.jpg ; http://pbraun.nethence.com/practicalRTF/art/img/normal/nnabe.jpg<br /> Élégant or not élégant ?<br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> <br /> Ma seconde partie sera consacrée aux couturiers. Mais j’ai prévu de parler des écrivains.<br /> <br /> <br /> Nabe s’inspire clairement de certains écrivains des années trente. Vrai pour son écriture (Céline) et pour sa mise.<br /> <br /> <br /> Aujourd’hui, Matzneff et Renaud Camus (curieux mélange de Jacques Perret et d’un Village people vieillissant !) font des efforts.<br /> <br /> <br /> Merci de vos mots d’encouragement.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> Ah oui, très bien comme article!<br /> <br /> Chez les architectes hélas, tout est perdu! JM Wilmotte a un peu de goût, un peu...<br /> <br /> Et chez les commissaires priseurs, pas de 'bonne' généralité hélas. Mais ils sont, pour certains et comme de nombreuses personnes dans les milieux de l'Art, bien vêtus.<br /> <br /> <br />
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O
<br /> Erratum post-commentaire traditionnel : "avec quelle autre pièce..."<br /> <br /> (Un jour, je le sais, je parviendrai à vous rédiger un commentaire sans trop de fautes, et du premier coup.)<br /> <br /> <br />
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O
<br /> J'aurais évidemment mauvaise grâce à vous contredire. Surtout pour ce qui concerne votre dernier point. Et pourquoi voudrais-je le faire d'ailleurs ?<br /> <br /> Je peux me tromper, mais il me semble qu'autrefois (naguère ?), le goût suffisait. Le goût et un peu d'argent. Point n'était besoin de beaucoup de culture pour se bien vêtir. Aujourd'hui,<br /> effectivement, ces trois composants - goût, culture et argent - semblent nécessaires, pour ne pas dire indispensables. Pas forcément dans des proportions égales. Mais il est vrai que j'aurais<br /> tendance à donner la priorité à la culture.<br /> <br /> Mais qu'est-ce que la culture vestimentaire ? Je suppose que la réponse est à chercher dans les codes. Les codes et leur histoire : comment, où et quand est apparu tel ou tel type de vêtement, dans<br /> quelles circonstances il se portait, et avec quel autre pièce de la garde-robe il était associé.<br /> <br /> Le goût ? Le goût induit à mon avis une forme de créativité. Il repose sur la connaissance intuitive et profonde des formes et des couleurs (et de leurs accords -ou désaccords -entre eux), de la<br /> qualité des matières et des motifs. Il permet de jouer avec les codes, au risque, d'ailleurs, d'en inventer de nouveaux.<br /> <br /> Enfin, l'argent (au moins un minimum), sans lequel, soyons justes, il est difficile, surtout aujourd'hui, de faire grand chose de valable.<br /> <br /> Cela dit, je dois reconnaître aussi que, même dans le milieu du marché de l'art (où, effectivement, et a priori, ces trois paramètres semblent réunis à parts plus ou moins égales), on voit de plus<br /> en plus souvent, croyez-moi, des choses assez consternantes. (Et je ne parle pas seulement de personnes qui s'affublent de velours côtelé noir.)<br /> <br /> Amicalement,<br /> <br /> Olivier<br /> <br /> <br />
Répondre
L
<br /> <br /> <br /> - J’ai mon échelle de valeurs, qui va de l’absence de goût au goût en passant par le mauvais goût, le petit goût et le bon goût.<br /> <br /> <br /> - Culture – goût – argent. L’argent est un moyen et ne saurait être une fin, sauf à admettre que l’élégance est indissociable du luxe – ce que je ne crois pas. Si j’osais une<br /> pagnolade, je dirais que, pour réussir le cocktail, il faut un grand tiers de culture, un moyen tiers de goût (… ou peut-être le contraire !) et un petit tiers d’argent. Je compte<br /> rédiger un billet qui traitera du sujet mais par le petit bout de la lorgnette. Son thème : la cravate Hermès. Elle est chère, luxueuse – et, pourtant, elle fait un moins beau nœud que<br /> beaucoup de cravates qui valent la moitié de son prix.<br /> <br /> <br /> - Ainsi donc, l’élégance n’aurait plus vraiment la cote chez les commissaires-priseurs et experts d’art… J’ai dit « la cote » et pas  « la côte » (de velours – noir<br />  - s’entend !) Il faudra que je me trouve de nouvelles illusions…<br /> <br /> <br /> Amicalement.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />

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