A Milan et à Paris ont eu lieu le mois dernier les défilés prêt-à-porter hommes Automne-hiver 2010-2011 (cf. Les défilés Prêts-à-porter Automne-hiver 2011) - et, ce mois-ci, c'était New York. Ce genre de manifestation nous rappelle à quel point nous, les hommes, sommes avantagés sur nos compagnes pourvu que nous restions insensibles aux séductions de la mode. Et la mode n’intéresse pas – sinon par curiosité – les hommes élégants. Plaignons donc les femmes, obligées de tenir compte à chaque nouvelle saison des fantaisies intéressées des faiseurs de tendances ! Madeleine Vionnet, à qui les Arts décoratifs ont récemment consacré une exposition, le disait très bien : « Il y a dans les caprices saisonniers, fugitifs, un élément superficiel et instable qui choque mon sens de la beauté. »
Autre avantage : quand les tenues des femmes sont tributaires de leur âge, celles des hommes sont presque toujours les mêmes de l’entrée dans l’âge adulte jusqu’à la vieillesse.
Une garde-robe masculine digne de ce nom se construit lentement et ne se démode jamais. La plupart des principes édictés voici près d’un siècle sont encore valables aujourd’hui. Le temps est notre allié ; sachons en profiter ! Raisonnons nos achats : c’est ce à quoi veut aider, modestement, un blog comme celui-ci. Les jeunes, plus sensibles aux sirènes de la mode, ont particulièrement besoin d’être guidés. Qu’ils méditent cette réflexion de Philippe Julian – que j’ai lue autrefois dans sa biographie d’Oscar Wilde; je cite de mémoire : « Un homme élégant préfèrera toujours un seul costume bien coupé à toute une garde-robe improvisée. »
Au bout du compte, additionner patiemment des vêtements intemporels et de qualité est-il plus onéreux que de multiplier les vêtements à la mode – vite donnés ou jetés ? « Je ne suis pas assez riche pour acheter de la mauvaise qualité » : on connaît ce paradoxe inspiré par le bon sens. Savoir faire les bons choix évite les regrets. Et permet de se constituer un fonds de vestiaire que des achats espacés suffiront à faire évoluer. L’expérience invite à la nuance, voire à la répétition, plutôt qu’au changement. On se procurera deux paires de souliers identiques mais dans des tons différents. On achètera en plusieurs exemplaires une cravate dont on craindra de ne plus retrouver le modèle. On appréciera que son tailleur ne change rien à une coupe jugée parfaite.
Regardez ce portrait de Bruce Boyer :
J’ai analysé une autre fois la perfection de la mise (cf. De l’art de s’habiller) . Je voudrais insister aujourd’hui sur son intemporalité. Cette photo date de 2006. Mais vous reconnaîtrez avec moi qu’elle aurait pu aussi bien être prise deux, trois… six, sept décennies auparavant. « La mode se démode, le style, jamais », disait Chanel.
Harmonie des formes et des couleurs, qualité des matières, recherche du style : tels doivent être nos critères quand nous fournissons notre vestiaire. La mode reste à la porte. Elle n’est tout simplement pas faite pour nous.