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23 mai 2015 6 23 /05 /mai /2015 07:53

 

pierre-drieu-la-rochelle.jpgPierre Drieu La Rochelle

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1 mai 2015 5 01 /05 /mai /2015 07:12

« Le dessin de Modigliani est d’une élégance suprême » affirmait Cocteau. J’en ai eu la confirmation récemment en parcourant un album de ses œuvres. Les portraits d’hommes témoignent, au même titre que ceux de femmes et que les nus, d’un sens aigu de l’élégance de la ligne. Un de ses modèles affirma qu’il n’indiquait jamais de pose, qu’il laissait le sujet prendre une position naturelle. L’examen des œuvres me fait douter de cette version. Les poses, concertées et souvent semblables d’une toile à l’autre, n’ont pas l’air de devoir grand-chose au hasard. J’imagine volontiers Modigliani guidant à leur insu ses modèles jusqu’où il voulait exactement qu’ils arrivent. Les mains sont assez fréquemment posées sur les genoux, à la façon, je crois, toscane :


modi-zboro.jpgLeoplod Zborowski, 1918-19

 

D’autres fois, une main soutient nonchalamment le visage :


modi-jean-alex.jpg Jean Alexandre, 1909

 

… ou se glisse dans une poche :


modi-paul-alex.jpgPaul Alexandre, 1909    

 

Objectivement, les doigts sont souvent gros, mais ce n’est pas ainsi qu’ils nous paraissent : le peintre est un illusionniste ! Le mouvement des bras est toujours gracieux, fluide. L’inclinaison quasi systématique des visages ajoute à l’élégance et dynamise la représentation. La mise en image(s) est aussi mise en scène, comme dans le genre du portrait mondain auquel il me semble que l’art de Modigliani a emprunté certains traits. Les accessoires n’attirent pas l’attention sur eux. La cigarette se fait oublier. Le chapeau est placé haut (… à ne pas imiter dans la réalité !) pour ne pas dissimuler le visage. La cravate, de couleur sombre et aux proportions parfaites, se fond dans l’ensemble.


modigliani-paul-guillaume-def.jpgPaul Guillaume, 1915


modi-paul-guillaume-deux.jpgLe même, 1916


modi-bara.jpgMonsieur Baranowski, 1918

 

L’essentiel, c’est le visage dont il nous fait sentir inlassablement le mystère. La ressemblance est là, qu’une stylisation extrême malmène à peine.


modi-cocteau.jpgJean Cocteau, 1916, littéralement "tiré à quatre épingles" !

 

Miracle d’un art qui rend compte de la réalité en usant de formes qui n’ont pas grand-chose à voir avec elle ! Et, au milieu des visages, surgissent souvent des regards sans yeux, étrangement plus expressifs que les yeux sans regard que nous croisons tous les jours dans nos rues.

Le sens de la pose, Modigliani ne l’avait pas qu’en tant que peintre ; il l’avait aussi devant l’objectif. Son maintien, visiblement étudié, met le corps en mouvement. L’affectation n’est pas toujours évitée, comme sur ce cliché :


modi-lavalliere.jpg

 

« Il lui était insupportable de passer inaperçu (…) Il y avait en lui de l’acteur », écrivit Adolphe Basler. La simplicité du geste ne nuit pourtant pas à son efficacité, bien au contraire : ainsi sur ce cliché de 1909 où il suffit que les mains soient posées sur les hanches pour que la pose soit remarquable de naturel :


modi-pull.jpg

 

Sa vêture évolua. Ardengo Soffici, qui le rencontra à Venise en 1903, note son « élégance discrète ».


modi-1903.jpgModigliani en 1903, quand A. Soffici le rencontra

 

Arrivé à Paris, Modigliani adopte bientôt le style artiste alors en vogue chez les peintres. Braque et Picasso sont en bleu de travail, Van Dongen en tricot de marin… Pour lui, ce sera le costume de velours, genre terrassier, accompagné d’un « foulard éclatant » et d’ « un large feutre » (Louis Latourettes).


modigliani-def.jpg

 

Quand Pierre Bertin (1) le croise à Nice en 1918, il est « misérablement vêtu ». Un an plus tard, très exactement à l’automne 1919, il parade en costume de velours gris clair presque neuf avec un beau foulard. Cette même année 19, quand son marchand Zborowski, qui doit se rendre à Londres, lui demande ce qu’il veut, il répond : « De belles chaussures ».

Les témoignages des contemporains ne sont pas d’accord sur tout, mais ils se rejoignent sur un point : la noblesse de son expression. Le voisinage des lexiques est troublant : « une noblesse excédée », dit Paul Alexandre, qui emprunte l’expression à Baudelaire ; « l’air d’un prince », dit Jacques Lipchitz ; « la mine d’un aristocrate », dit André Salmon ; « un visage aux traits nobles », dit Pierre Bertin…

Aristocrate donc, et, selon l’expression de Cendrars, « pochard ». Mais un pochard lettré : « (Il) récitait, se souvient Cendrars (Bourlinguer), des passages de la Divine Comédie au milieu de la chaussée et (…) commentait Dante à coups de trique. » Il avait lu Villon, Baudelaire, Laforgue, Verlaine, Mallarmé, Nietzsche, d’Annunzio… On dit qu’un exemplaire des Chants de Maldoror de Lautréamont ne quittait jamais sa poche. Ses goûts étaient ceux d’un homme sensible et tourné vers le beau. Il s’essaya à la poésie :

« Du haut de la Montagne Noire, le Roi
Celui qu’Il élut pour régner, pour commander
Pleure les larmes de ceux qui n’ont pu
rejoindre les étoiles
… »

Mais, chez Modigliani, le fleuve de la poésie sort du lit douillet des vers. La poésie irrigue tout ce qu’il fait. Elle s’étend à ses dessins, à ses peintures, à ses sculptures. C’est elle qui tient le crayon quand, dans une lettre à Zborowski, il écrit : « J’ai flâné un peu ces jours-ci ; la féconde paresse : le seul travail. » - ou, sur une carte postale à Paul Alexandre : « Le bonheur est un ange au visage grave »… C’est encore elle qui lui fit reconnaître l’amour dans le visage de la jeune Jeanne Hébuterne. Etait-elle brune, blonde ou rousse ? Je l’ignore. Un témoin parle de « ses blondes nattes », un autre de « ses cheveux châtain foncé » et Modigliani la peignit en rousse… Les rares clichés qu’on a d’elle la montrent plutôt brune, mais ils sont en noir et blanc…


Jeanne-Hebuterne.jpg

 

Qu’elle était la couleur de ses yeux ? Bleus sur un portrait, marron sur l’autre…

Je veux croire qu’il aima d’abord Jeanne pour son visage, qu’on aurait dit sorti d’un tableau de ces peintres préraphaélites qu’il admirait. Les esthètes aiment la vie quand elle imite l’art. L’histoire de Jeanne et d’Amedeo fut noble et tragique. Et brève : à peine trois ans. Modigliani mourut jeune, comme il en avait eu le pressentiment. Jeanne le suivit dans la mort, comme elle l’avait annoncée. Le lendemain du décès de son amant, elle se jeta du cinquième étage d’un immeuble. Elle était enceinte de neuf mois.

 ______________________________________________________________________________________________
1. Ah ! Pierre Bertin ! C’est, dans Les Tontons flingueurs, le père de François (Claude Rich), Adolphe Amédée Delafoy.
2. Ouvrages consultés : Amedeo Modigliani, prince de Montparnasse, Herbert Lottman, Calmann-Lévy ; Histoire de la coquetterie masculine, Jean Claude Bologne, Perrin ; Bourlinguer, Blaise Cendrars, Folio Gallimard ; Modigliani, Gaston Diehl, Flammarion.

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6 mars 2015 5 06 /03 /mars /2015 06:46

"FMR", fidèle lecteur et commentateur, m'a proposé cet intéressant billet portant sur un domaine que je connais peu. Je suis très heureux de vous le faire lire aujourd'hui.

 

En France, les jugements portés sur la musique classique concernent souvent l'apparence. Guindé, snob, coincé, vieillot, ringard, bourge(ois) sont des qualificatifs classiquement utilisés pour décrire les musiciens, le public et même les œuvres. Pourtant, le monde du classique a évolué comme le reste de la société : vers moins de formalisme. L'habit et le smoking se font rares hors les grands orchestres et les grandes salles, le costume sombre de qualité quelconque est devenu la norme. On ne peut pas non plus dire que le public soit spécialement élitiste : il est habillé comme tout le monde (et il se trouve toujours des gens pour applaudir entre les mouvements).

Il y a bien sûr des personnages à l'allure plus notable, ainsi que va nous le montrer cette petite galerie de chefs d'orchestre et solistes.

Mais commençons par une digression : j'ai récemment découvert Max Raabe, un chanteur allemand (de formation classique) qui avec son orchestre fait des reprises dans le style des années 20/30. Il porte impeccablement l'habit, ses musiciens le smoking et tout le monde est content. Comme quoi...

 

Max-Raabe-copie-1.jpg

 

A contrario, pour attirer le public supposé rebuté par le costume, on lui propose des rebelles trop cool qui, lui assure-t-on, sont de vrais stars dans le monde du classique. L'archétype de ce genre d'alibi est le violoniste Nigel Kennedy (1956--) au style punk-trash.

 

nigel-kennedy.jpg

 

Le très respectable, respecté et bien élevé sir John Eliot Gardiner (1943--), chef d'orchestre spécialiste du baroque, est parfois pris de fantaisie : il porte alors des tuniques chinoises avec parements.

 

eliot-gardiner-tunique.jpg

 

La fantaisie demeure élégante, néanmoins l'habit va mieux à l'ancien élève de Cambridge.

 

eliot-gardiner.jpeg

 

Ces tuniques seraient peut-être mieux portées par Jean Guillou (1930--), titulaire du grand orgue de Saint-Eustache, qui avec ses yeux perçants et sa chevelure blanche massée de part et d'autre de son crâne ressemble au Dracula de Coppola.

 

jean-guillou.jpg

 

Le chef d'orchestre Claudio Abbado était souvent comparé à un magicien. Il savait en effet faire s'incarner la grâce. Ce personnage, humble et discret, fuyait la publicité (le contraire absolu de Karajan, son prédécesseur au Berliner Philharmoniker), on n'a donc pas d'images de lui dans le civil. Au concert il restait fidèle aux traditions et portait avec naturel habit, smoking ou veston bien taillés ; favorisé par un physique élancé et un beau profil.

 

claudio-abbado.jpg

 

Sa direction même était élégante : pas de grands mouvements pour la galerie, mais une gestuelle souple et fluide, comme s'il sculptait le son. Au tournant des années 2000, un temps rescapé d'un cancer, il réapparaît subitement vieilli, le visage émacié et hâve, l'expression parfois plus douloureuse mais irradiant toujours la grâce et le bonheur.

Son ami le comédien Bruno Ganz disait de lui : « Il a su cultiver et maintenir sa propre pureté d’âme ; une pureté à laquelle il n’a jamais voulu renoncer malgré l’âge adulte. Et je vois en lui une certaine similitude avec Hölderlin, dans la conservation d’une idée pure et enfantine de la poésie — poésie en tant que qualité absolue — comme moyen de communication à appliquer aussi dans sa propre vie. Hölderlin l’a réalisé comme poète : Claudio en témoigne comme musicien »

 

Gustav Leonhard (1928—2012) fut un honnête homme, au sens historique : légende du clavecin, fer de lance du renouveau baroque, il disait pourtant « avoir passé plus de temps avec la peinture qu’avec la musique ». Par certains côtés il vivait littéralement dans le passé : il habitait dans la Bartolotti Huis construite en 1617 sur le Herengracht à Amsterdam. Depuis 1750 « tout [y] est resté exactement à l’identique : les portes, les cheminées, les lambris, les parquets, les planches dans les armoires, les carreaux de faïence, tout ! » Selon un édit de 1630, le jardin devait rester jardin « jusqu’à la fin des temps ». Leonhardt y abritait ses instruments et sa collection de mobilier et objets d'art hollandais, allemands et français datant du XVIe au XVIIIe siècle. Il n'allait pas jusqu'à s'habiller à la mode baroque, sauf pour un film où il tint le rôle de Bach.

 

gustav-leonhard-bach.jpg

 

Grand et sec, le profil sévère, le sourire bridé, son apparence, en tout cas celle qu'il montrait au public, était en harmonie avec son expression musicale, à propos de laquelle Jacques Drillon parle de « tonicité janséniste » (Leonhardt était calviniste).

 

gustav-leonhard-profil.jpg

 

Son refus de l'étalage des sentiments et de l'ego —  il se présentait comme un medium entre le compositeur et l'audience et disait ne pas comprendre « le culte des solistes » — était peut-être excessif. Après avoir, enfant, adoré Wanda Landowska, il la jugeait « trop personnelle », « très égoïste » ; il ne l'était peut-être pas assez...

Avant de quitter le XVIIIe, citons une suite de douze variations de François Couperin : Les Folies françoises ou les Dominos [on rappelle qu'il s'agit d'un habit de bal masqué, sorte de cape avec une capuche] - successivement  : la virginité sous le domino couleur d'invisible  ; la pudeur sous le domino couleur de roze ; l'ardeur sous le domino incarnat ; l'espérance sous le domino vert ; la fidélité sous le domino bleu ; la persévérance sous le domino gris de lin ; la langueur sous le domino violet ; la coquéterie sous diférens dominos ; les vieux galans et les trésorières suranées sous des dominos pourpres et feuilles mortes ; les coucous bénévoles sous des dominos jaunes ; la jalousie taciturne sous le domino gris de maure ; la frénésie, ou le désespoir sous le domino noir.

Glenn Gould (1932—1982) était aussi protestant, il se surnommait lui-même le dernier des puritains. À 32 ans il avait abandonné le concert pour l'enregistrement à cause, c'est notable, de raisons morales. « Sur le plan moral, je réprouve même les concertos et je n'aime pas cet aspect de compétition. (...) Tout ce qui est mélange de virtuosité et d'exhibitionnisme sur scène est tourné vers l'extérieur ou mène à l'extraversion et je considère cela comme un péché, pour employer un mot démodé. ». Gould n'a jamais suivi la mode et a toujours aimé les lainages chauds : veste en Harris tweed, écharpe en Shetland, gants ou mitaines en grosse laine, casquette en tweed. Il y a quand même des variations selon les époques, on peut mettre en parallèle ses déclarations sur la musique et l'évolution de son apparence. Jeune, il aimait la « course rythmique précipitée » à quoi correspondaient une certaine exubérance et un éclat sensuel.

 

glenn-gould.jpg

 

Plus tard on le retrouve peigné, vêtu avec une discrétion de bon aloi, cherchant l'équilibre entre la « sévérité teutonique et la jubilation débridée » dans l'exécution d'une fugue du Clavier bien tempéré.

 

glenn-gould-classique.jpeg

 

Ensuite, à mesure qu'il s'éloigne du monde, qu'il se perd au monde, la cravate tombe, les cheveux sont laissés libres, les habits s'assombrissent ; les tempi deviennent lents et réfléchis et il déclare « J'aimerais pouvoir penser qu'il règne dans ce que je fais une sorte de paix automnale (...) il serait satisfaisant de se dire que ce que nous réalisons sous forme d'enregistrement contient virtuellement un certain degré de perfection, non pas d'ordre purement technique, mais aussi d'ordre spirituel ».

 

glenn-gould-3.jpeg

                                                                       

                                                                                                               FMR

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 06:41

Sur le chapitre de l’élégance, nos hommes d’Etat ont beaucoup à apprendre. Enfin, la grande majorité d’entre eux. Deux figures du passé récent pourraient les inspirer : Anouar El Sadate et Hassan II.

Anouar El Sadate avait, comme on dit, un profil de médaille.


sadate.jpg

 

Celui d’un pharaon. Il émanait de lui une noblesse naturelle qui rendait superflu le recours à l’artifice. Aussi sa mise était-elle d’une grande simplicité : costumes droits, chemises blanches à angle de col assez ouvert et à poignets mousquetaire, cravates à motifs ou à rayures assorties au costume. Le tout provenait d’Angleterre. Une élégance intemporelle, si ce n’est les motifs assez grands des cravates qui trahissaient les années 70. Le port de tête, fier, pour ne pas dire royal, était souligné par le col de chemise qui, comme chez le prince Charles par exemple, dépassait largement le (bon) centimètre habituellement conseillé.

Il se tenait très droit, portait le menton assez haut et ne se départait jamais d’un air de dignité. Son allure n’avait pas échappé à Valéry Giscard d’Estaing qui, dans ses mémoires (Le Pouvoir et la vie), l’évoque en ces termes : « Parmi les dirigeants de l’époque, le président Sadate était celui qui avait le plus d’allure (…) il était grand, élancé (…) avec (…) une silhouette et un maintien d’officier anglais. »


sadate-deux.jpg

 

L’élégance du roi Hassan II était plus « orientale ». Plus tape-à-l’œil. Bagues (généralement deux), bracelet(s), montre à bracelet en or, pince de cravate, fume-cigarette, pochette… Les accessoires étaient nombreux. La gomina – dont il usait et abusait – l’aidait à plaquer sur le sommet du crâne une mèche « à la Giscard ». Avec ça, il réussissait néanmoins le prodige de n’être jamais vulgaire.


hassan.jpeg

 

Sa gestuelle était empreinte d’une grande délicatesse, voire d’une certaine féminité. Sa voix douce, onctueuse, était à l’unisson. Quand il s’exprimait dans notre langue, c’était avec le souci du mot juste, de la tournure syntaxique idoine. L’affectation n’était pas loin et je n’irais pas jusqu’à dire qu’il sut toujours l’éviter.

Il n’était pas grand (il portait des talonnettes), mais, se tenant droit et étant mince, il ne manquait pas d’allure. Une allure déliée, souple, féline. Ses costumes, Smalto, dessinaient nettement sa silhouette. Une ligne idéalement adaptée à sa complexion.


hassan-2.jpg

 

« Le style, c’est l’homme », aimait-il à répéter, attribuant, au passage, à Pascal cette sentence de Buffon. Le style de Hassan II était celui d’un homme épris de perfection. Obsédé, même, par elle.

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29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 06:43

Regardez leurs souliers, j'ai dit leurs souliers.

 

premiers-ministres.jpgSource : La Provence.

 

Merci à Matthieu B.

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20 janvier 2015 2 20 /01 /janvier /2015 07:10

« Je suis Charlie », nous dit Valls sur cette photo :


manuel-valls-charlie.jpg

 

Avec son trench noir trop court, sa cravate gris clair en soie brillante, sa trop grosse alliance… bien sûr que Manuel Valls est « charlie » ! Et même « hypercharlie » !

N'est-ce pas James Darwen ?

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9 novembre 2014 7 09 /11 /novembre /2014 07:26

Vous connaissez l’histoire : Arnaud Montebourg a fait sa rentrée des classes le 3 novembre dernier. Il a intégré pour un mois le très prestigieux et très onéreux INSEAD afin d’y suivre un programme dont la désignation – « Advanced Management Programme » - heurte méchamment les oreilles des défenseurs du parler de France.

L’événement, cocasse, n’a pas manqué d’attirer les médias.

Moi, ce qui a retenu mon attention, c’est la tenue d’Arnaud Montebourg. Regardons ça d’assez près :

 

arnaud-montebourg-ecole-def.jpg

 

Pour dire les choses brièvement (je ne vais tout de même pas m’étendre sur le sujet !), il avait revêtu pour l’occasion un ensemble costume-cravate très vallsien – comprenez : chemise blanche ; costume et cravate unie assortis – sous un duffle-coat.

L’effet est déplorable. Une grisaille uniforme sans espoir d’éclaircie. On ne le répètera jamais assez : passé, disons, la trentaine, le duffle-coat et sa capuche est un vêtement immettable. Qui plus est, le choisir gris et ne même pas veiller à le positionner correctement sur les épaules…

Ainsi vêtu, notre ancien ministre ressemblait tout à coup à un étudiant très, très, très attardé. Difficile de reconnaître dans ce personnage falot encombré d’un lourd cartable le « jeune lion » flamboyant de naguère ! A force de jouer à la plus maligne, la communication politique commet de ces bourdes…

La liste de nos ex-ministres devenus avocats est longue. Arnaud Montebourg, qui a été avocat et qui pourrait le redevenir s'il le souhaitait, a préféré se lancer dans les affaires. En robe, il avait pourtant belle allure. Et Dieu sait si, pour un homme, la robe n'est pas facile à porter ! Sur certains, elle fait vite… mauvais genre.

 

conchita-wurst.jpgConchita Wurst

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5 novembre 2014 3 05 /11 /novembre /2014 06:29

... Et les autres

 

Roger Nimier avait sa tête de Turc : Jean-Paul Sartre. Il pensa et écrivit contre lui. L’un était grand et beau ; l’autre, petit et laid. L’un s’habillait en banquier ; l’autre – d'origine bourgeoise – se déguisait en prolétaire : la canadienne et le polo devinrent ses vêtements fétiches. Le Hussard avait l’allure dégagée ; l’écrivain engagé n’avait pas d’allure. Nimier avait de l’esprit, mais, au contraire de Sartre, il n’avait pas celui de système. Il se voulait libre, désinvolte, provocateur. Qu’on le prît pour un milliardaire le faisait sourire : à preuve, cette célèbre photo qui le représente appuyé sur l’aile d’une ancienne Rolls-Royce, comme si elle lui appartenait. Car c’est un jeu : un jour que cette Rolls était garée devant la porte des Editions Gallimard, il trouva amusant de poser « en propriétaire ».

 

roger-nimier-def.jpg

 

Nimier et les voitures : une histoire d’amour et de mort. Il se tua le 28 septembre 1962 à bord de son Aston Martin DB 4. Il avait trente-sept ans. Jean-Paul Sartre, prudent, n’apprit jamais à conduire.

 

 *

 

« On peut être Dandy avec un habit chiffonné. » Il semble que Jacques Laurent ait voulu, par l’exemple, illustrer la pertinence de ce propos de Barbey d’Aurevilly. La mise de Jacques Laurent avait toujours quelque chose d’usé – d’exténué. Il n’y avait pas que son habit à être chiffonné ; son visage aussi, marqué d’excès divers.


jacques-laurent-def.jpg 

 

A y regarder de près, sa négligence était concertée : cravate légèrement dénouée, façon Frédéric Taddeï avant l’heure ; foulard de soie trop hâtivement noué ; éternelle cigarette pointant au sommet d’un avant-bras systématiquement relevé... Son visage, qu’il aurait voulu impassible comme le masque du Dandy, trahissait sa tristesse. S’il est vrai que, comme l’affirmait Baudelaire, le dandysme est un « culte de soi-même qui peut survivre à la recherche du bonheur à trouver dans autrui, dans la femme par exemple », alors non, Jacques Laurent ne fut pas un Dandy. Il se suicida trois mois après la mort de sa femme, ne supportant plus « un monde que (son) absence (avait) transformé en cauchemar. »

 

 *

 

Les écrivains furent longtemps des modèles d’élégance. Michel Déon – éternel jeune homme vert de quatre-vingt-quinze ans – est l’un des derniers à perpétuer la tradition. Il importe peu à cet homme de fidélité de paraître anachronique : il s’habille comme il s’est toujours habillé. Son style emprunte à celui du gentleman-farmer ; ses longs séjours irlandais n’y sont sans doute pas pour rien. Casquette de tweed, cravate de tricot, pull Shetland, chemise Tattersall, pantalon de velours, imperméable Burberry sont les pièces maîtresses de son vestiaire.

 

michel-deon-gentleman-farmer.jpgHélène Bamberger, Figaro photo

 

Point de mélanges hardis de couleurs : l’influence britannique est ici mâtinée de classicisme français. L’élégance de Déon : anglaise pour un Français ; française pour un Anglais. A l’heure des écrivains lookés « geek », le dernier des Hussards fait figure de provocateur !

 

S’habiller à la « hussard » ?

 

Existe-t-il un uniforme « hussard » ? Sûrement pas ! Et pour cause : les Hussards, épris avant tout de liberté, s’habillaient comme ils écrivaient, en suivant leur tempérament. Tous, d’ailleurs, prirent bien soin de découdre l’étiquette « Hussards », qu’ils n’avaient pas choisie. Au milieu des années 80, on vit refleurir la marque, précédée d’un suffixe alors à la mode : « néo ». Comme leurs aînés, ces « néo-hussards » avaient le goût de l’indépendance. Dans leurs vestes de tweed, Eric Neuhoff et Didier van Cauwelaert avaient l’air d’être les fils de Michel Déon, et Denis Tillinac, avec sa bouille de déjà vieux gamin, celui de Jacques Laurent. Mais il en va de l’histoire littéraire comme de l’histoire tout court : elle ne repasse pas les plats.

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28 octobre 2014 2 28 /10 /octobre /2014 06:27

Antoine Blondin...

 

En 1950, Roger Nimier publie Le Hussard bleu. En 1952, le critique Bernard Frank, dans un article resté fameux des Temps modernes, appelle « Hussards » trois jeunes écrivains remuants, Roger Nimier, Jacques Laurent et Antoine Blondin. Ces hussards bleus de la République des lettres pratiquaient la désinvolture comme un bel art. Au vrai, pas du tout républicains eux-mêmes ! Un an plus tard, Michel Déon, qui fut le secrétaire de Maurras, les rejoindra. Ces quatre-là ont en commun au moins deux choses : le style et la séduction. En ces années, Blondin pouvait encore espérer que l’alcool, dont il abusait déjà, n’abîmerait jamais son visage fin et romantique. En 1952, lorsqu’il publie Les Enfants du bon Dieu, les grands yeux mélancoliques semblent appeler au secours. Et la calvitie menace :


 antoine-blondin-jeune-fin.jpg


 *

 

1972. Voilà deux ans que Blondin a publié Monsieur Jadis ou l’école du soir. Son confrère Michel Tournier, passionné de photographie, a une idée originale : demander à son ami le photographe Edouard Boubat de portraiturer des écrivains, à charge pour ceux-ci d’écrire sur leur visage. Cela donnera un curieux livre, intitulé Miroirs, aux éditions Denoël. Antoine Blondin est un des quatre-vingt-trois écrivains à s’être prêtés au jeu. Voici son portrait photographique :


blondin-boubat.jpg 

 

Quant au portrait de l’écrivain par lui-même, on voudrait le citer en entier. La verve de Blondin s’y donne à plein, et son amour des calembours et des mots à double-fond : « Ce jour-là, rêvant d’une vie toujours recommencée, à l’image de l’amer ou de l’anis, ou du bitter, je me portais aux hublots d’un « bougnat » de hauts bords où j’ai un toit et une ardoise », etc. « Le calembour est la fiente de l’esprit qui vole », disait Hugo. Marchons dans les calembours de Blondin : ça porte bonheur ! Et admirons le hasard – trop beau pour être vrai – du numéro de téléphone en travers de la braguette qui, dit joliment Blondin, « dénonce une vocation de call boy » ! On ne plaisante pas avec la plaisanterie ; chez Blondin, elle signe la profondeur. Dans la conclusion de son autoportrait, il écrit : « La vraie plaque sensible, c’est derrière ce front amplement dégarni qu’elle se tient. » La calvitie a mis sa menace à exécution.


*

 

Plus tard - il ne nous est pas possible de dire exactement quand -, Blondin se laisse pousser une barbe poivre et sel qu’il prend grand soin de ne pas tailler.


antoine-blondin-barbu.jpg 

 

Comme ça, il ressemble à Verlaine ou à un clochard céleste. Clochard, à demi ; céleste, absolument. Sa soûlographie, qui s’accentue, lui attire les faveurs des médias. Son œuvre intéresse moins les journalistes que son penchant pour la bouteille dont, quelques verres dans le nez, il leur parle avec douceur, le phrasé lent, l’œil pétillant. L’alcool était devenu son enseigne. Quand même, il était décevant : avec lui, pas de scandale à la Bukowski ou à la Gainsbourg. Dans son éternelle veste sport pied-de-poule beige largement (c’est le cas de le dire : il flottait dedans !) passée de mode, il ne se départait jamais d’un air digne, égal. A la fin, sa solitude s’accentua. L’alcool avait achevé d’user son foie et la patience de ses proches. Il partit le 7 juin 1991, à 69 ans. Grâce à Dieu – ou à Bacchus -, il aura abordé la vieillesse sans jamais avoir été un adulte. Avec ça, la sveltesse d’un éternel jeune homme.

« Je suis mince, mon œuvre aussi », aimait-il répéter. La postérité ne juge pas les œuvres au poids. L’œuvre mince de Blondin a tout de même du mal à se faire une place sous son soleil. Citez « Un singe en hiver » et l’on croira que vous parlez du film de Verneuil ou de sa récente transposition théâtrale avec Eddy Mitchell. Il est urgent de lire ou de relire Antoine Blondin pour qu’on dise : Mêm’ pas mort, Monsieur Jadis ! Toujours présent.

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22 septembre 2014 1 22 /09 /septembre /2014 07:09

 

« Enfin la maladie, qui rend tout plus sordide,
Et le corps fatigué qui se mêle à la terre,
Le corps jamais aimé qui s’éteint sans mystère »

Michel Houellebecq, La Poursuite du bonheur

 

Fin août, Arte a diffusé un téléfilm de Guillaume Nicloux intitulé L’Enlèvement de Michel Houellebecq. L’œuvre est étrange et inclassable ; elle m’est surtout apparue poignante en raison de la dégradation physique de son acteur principal, Michel Houellebecq lui-même.

Son visage est émacié, ses yeux sont creux, sa mâchoire supérieure n’a plus de dents (1), ses membres sont grêles. Sa fragilité lui donne quelque chose d’un enfant. Il parle bas, quoiqu’à de rares moments sa voix s’élève. On s’étonne alors de son coffre et de l’énergie que recèle encore ce pauvre corps à la dérive.

Ses portraits les plus récents font peur. En comparaison, le Houellebecq du film a presque l’air en bonne santé. « Il était dans un état de délabrement qui effrayait, l’un des hommes les plus vieux que j’aie jamais vus. » Ces lignes de Georges Bataille qui évoquent Antonin Artaud à son retour de Rodez s’adaptent étonnamment bien à celui qu’est devenu Houellebecq. Je le soupçonne d’ailleurs de cultiver la ressemblance en jouant, notamment, de ses cheveux, qu’il laisse longs.


 hoellebecq-artaud.jpgMichel Houellebecq, août 2014    

 

artaud-houellebecq.jpgAntonin Artaud

 

Dans plusieurs scènes du film, Michel Houellebecq pratique l’autodérision : la scène où on le voit s’initier au fight est hilarante, comme celle où, positivement imbibé, il se met en colère, le visage dissimulé derrière un masque de carnaval…

La dérision et l’autodérision ont envahi nos modes de vie. L’art contemporain en est plein. On déboulonne les statues, nos idoles se déboutonnent. On aime à se rappeler avec Montaigne que, si haut qu’on soit assis, ce n’est jamais que « sur son cul » et, avec la génétique, qu’on diffère à peine du singe. On se vautre dans le physiologique. La porte des toilettes, qu’on ne ferme plus, laisse voir le seul trône à la mesure de l’homme moderne.

Justement, à un moment du film, Michel Houellebecq, soumis à des problèmes gastriques, demande à ses geôliers la permission de s’ « y » rendre. Je crains que la caméra ne l’ « y » accompagne comme – ça me revient d'un coup – elle « y » accompagnait un Hervé Guibert moribond dans une bizarrerie filmique antérieure, La Pudeur et l’Impudeur. Mais non. Ce trash nous sera épargné.

La déchéance qui se met complaisamment en scène n’éveille ordinairement en moi aucune pitié. Les pitreries alcoolisées d’un Gainsbourg, par exemple, avaient le don de m’agacer. Pour être d’un autre ordre, l’autodérision dont fait preuve Houellebecq dans ce film n’en est pas moins déplacée ou – pour utiliser une épithète qu’il affectionne – déplaisante. Malgré tout, je ne peux m’empêcher d’y voir aussi, par-delà l’indignité qu’elle révèle, l’expression d’une profonde – et touchante - détresse.

A un autre moment du film, à l'un de ses geôliers qui l’interroge sur son éventuelle peur de mourir, Houellebecq répond que « c’est suffisant », autrement dit, pour citer Hugo, qu’il a bien assez vécu. Tout à coup, j'ai lu - ou cru lire -  en Michel Houellebecq comme dans un de ses livres ouverts ! A l'heure de l'hédonisme et du corps sain triomphants, cette vie qui confesse sa lassitude et ce corps qui expose sa misère sont notre mauvaise conscience. Le corps ruiné de Michel Houellebecq anéantit nos illusions (2).

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1. "Sans dents", Michel Houellebecq, mais millionnaire !
2. Sur Houellebecq, Houellebecq. L'air de rien.

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